1. Aller au contenu
  2. Aller au menu principal
  3. Voir les autres sites DW

Les idées toutes faites sur l'Afrique

Philippe Pognan22 août 2014

Au menu de ce tour d'horizon des journaux allemands sur l'actualité africaine : l'épidémie de fièvre hémorragique Ebola, la terreur de la secte islamiste Boko Haram et le massacre de milliers d'éléphants.

https://p.dw.com/p/1CzJR
Image : John Moore/Getty Images

Ebola n'est pas seulement une maladie infectieuse dangereuse. C'est aussi un phénomène culturel. Que se serait-il passé si le virus mortel s'était manifesté par exemple en Floride et non en Afrique de l'Ouest ? s'interroge la BZ, la Berliner Zeitung et livre la réponse: Alors l'épidémie serait déjà circonscrite. (...) Car Ebola n'est pas un virus inconnu qui, d'un coup, de manière inattendue, a tué des centaines de personnes quelque part en Afrique. Les virologues connaissent le virus depuis 1976 déjà, lorsqu'il a été découvert au Zaïre, l'actuelle RDC. Et c'est bien ce qui est scandaleux : depuis presque 40 ans on connaît cet agent pathogène très agressif et contagieux. Et s'il existe des remèdes, ils n‘ont pas été suffisamment testés et donc pas encore homologués. La raison : "trop cher" conclut le journal.

Les idées toutes faites des Allemands sur l'Afrique

Liberia Ebola Plakat in Monrovia
Monrovia, Liberia: des affiches informant sur les mesures de précaution à observer face à EbolaImage : Reuters

La FAZ, la Frankfurter Allgemeine Zeitung critique les stéréotypes que les Allemands ont dans la tête au sujet de l'Afrique… L'Afrique n'est pas une entité uniforme. L'Afrique est un continent qui compte plus d'une cinquantaine d'États, près d'un milliard d'habitants, plusieurs centaines de langues et de cultures. Le Zimbabwe n'a rien de commun avec le Ghana, l‘Ethiopie rien à voir avec l'Angola. L'Afrique est autant musulmane que chrétienne, rappelle l'éditorialiste.

L'Afrique peut être sèche et infertile comme elle peut être humide et fertile, selon les régions. L'Afrique enthousiasme autant qu'elle déçoit. En fait, l'Afrique est plutôt normale, estime la FAZ. Mais nombreux sont ceux en Occident qui ne veulent pas l'admettre, parce qu'une perception négative d'un monde étranger leur sert aussi à se persuader de leur prétendue supériorité. L'épidémie d'Ebola en est un exemple révélateur. Les reportages et les images télévisés en provenance du Liberia et de la Sierra Leone semblent confirmer l'idée que l'Afrique n'est constituée que de malheurs et de misère et que rien n'y réussit sans l'intervention du Tonton blanc.

L'épidémie d'Ebola a de graves conséquences

Ebola Seuche Liberia Nigeria Krankheit Epidemie
Au Kenya: contrôle et prise de température de voyageurs entrant sur le territoireImage : picture-alliance/dpa

Selon la taz, die tageszeitung, l'épidémie qui a débuté en Guinée et s'est ensuite propagée au Liberia et en Sierra Leone, avant de toucher le Nigeria, a des conséquences sociales et politiques désastreuses. Des gouvernements impuissants, aux moyens financiers limités, tentent d'endiguer la propagation du virus en dressant des barrages militaires autour de zones touchées, constate le journal. Une population désemparée et angoissée se désolidarise des malades et prend ses distances, craignant pour sa propre vie. Un pays en montre un autre du doigt, des opposants reprochent à leur gouvernement d'être trop lents à réagir, et les gouvernements, eux, expliquent qu'il faudrait changer les mentalités de la population.

Boko Haram au Cameroun

Le journal Neues Deutschland constate que la terreur répandue par le groupe islamiste Boko Haram dans le nord-est du Nigeria frappe de plus en plus fréquemment le Cameroun voisin.

C'est un fait: le problème Boko Haram touche désormais aussi le Cameroun. Au cours de ce mois, les membres de Boko Haram ont déjà tué dix personnes dans ce pays. Fin juillet, 15 autres personnes avaient été assassinées par la secte dans l'extrême nord du Cameroun et une douzaine d'autres avaient été prises en otages, dont la femme du vice-Premier ministre et le maire de la ville de Kolofata. Depuis qu'en février 2013, Boko Haram avait enlevé une famille française au Cameroun, les attaques de la secte islamiste se sont multipliées dans le nord du pays.

L'inquiétude et la peur de la population augmentent dans la région. Face aux attaques armées, souvent mortelles, face aux enlèvements répétés et aux vols, les Européens ont quitté la région. Le travail de coopération et de développement en souffre, rapporte le journal, comme par exemple celui de la DAFIUG, une société germano-africaine qui, avec des partenaires locaux, réalise des petits projets de scolarisation et de formation continue pour les jeunes filles et les femmes.

Le journal rappelle que des experts avaient, il y a déjà plusieurs années, averti du risque de voir le terrorisme se développer dans des pays où la situation sociale est difficile pour la population. Ainsi, personne ne devrait s'étonner si dans des pays connaissant des taux de chômage très élevés chez les jeunes, des groupes ou groupuscules fondamentalistes trouvent un terreau propice au recrutement de jeunes, pas seulement au Cameroun, conclut Neues Deutschland.

Nordkamerun Grenzregion zu Nigeria Mandara Berge
Les montagnes Mandara, près de la ville camerounaise de Mokolo, non loin de la frontière du NigeriaImage : AFP/Getty Images
Kamerun Soldaten gegen Boko Haram
Des soldats camerounais de la Brigade d'intervention rapide dans une ville frontalière Avec le NigeriaImage : Reinnier KAZE/AFP/Getty Images

"Des géants persécutés"

C'est sous ce titre que la Süddeutsche Zeitung évoque le sort de dizaines de milliers d'éléphants abattus en Afrique par des braconniers. Depuis quelque temps, les populations d'éléphants diminuent sur le continent, parce que le trafic d'ivoire vers la Chine est de plus en plus lucratif. Les défenseurs de l'environnement exigent l'interdiction complète de faire du commerce avec l'ivoire des défenses d'éléphants.

Ebola Seuche Liberia Nigeria Krankheit Epidemie
Des rangers kényans s'apprêtent à détruire une montagne de défenses amassées par des trafiquantsImage : picture-alliance/dpa

La petite ville de Kasane, au Botswana, montre l‘Afrique telle qu'elle pourrait être: un endroit détendu, largement exempt de criminalité et de corruption, avec en coulisses une nature belle à vous couper le souffle. Le fleuve Chobe, sur les rives duquel est située Kasane, se divise en plusieurs bras qui entourent des îles marécageuses à la végétation luxuriante. Des antilopes, des buffles d'eau, des hippopotames et surtout des centaines d'éléphants y paissent en toute tranquillité.

Afrika Elefant Silhouette
Image : shirophoto/Fotolia.com

La population d'éléphants du parc de Chobe est l'une des plus importantes au monde. On estime que 70 000 pachydermes y vivent, soit un éléphant sur sept en Afrique; sachant qu'un peu moins de 500 000 éléphants vivent en tout sur le continent africain. Mais tandis que des zones protégées comme celle de Chobe enregistrent un accroissement du nombre d'éléphants, des braconniers abattent chaque année des dizaines de milliers de ces géants dans d'autres régions du continent. Depuis 2010, la population totale d'éléphants africains baisse chaque année de 2%.

Afrikanischer Elefant
Dans le parc national Kruger en Afrique du SudImage : picture-alliance/dpa

L'accord de Washington CITES, accord de protection des espèces, interdit pourtant le commerce international de l'ivoire de défense d'éléphants depuis 1989. Avant, au cours de de la décennie précédente, les braconniers avaient éliminé plus de la moitié des 1,3 million éléphants vivant encore sur le continent en 1979. Mais malheureusement, relève la Süddeutsche Zeitung, le débat a très vite été relancé sur le commerce de défenses d'éléphants morts de mort naturelle. C‘est ainsi qu'il a été permis à quelques pays d'Afrique australe d'exporter légalement de l'ivoire vers le Japon et la Chine.

Une grosse erreur, déplore le journal, car la vente légale d'ivoire a de nouveau fait bondir la demande, surtout en Asie, une demande apparemment satisfaite à nouveau de manière illégale.