1. Aller au contenu
  2. Aller au menu principal
  3. Voir les autres sites DW

Mieux se comprendre

Julia Elvers-Guyot / Cécile Leclerc9 janvier 2013

Ils viennent de zones dites « sensibles » : des élèves allemands et français de Berlin et de Clichy-sous-Bois ont appris à se connaître et à se comprendre dans le cadre du projet « Le vent tourne ».

https://p.dw.com/p/17Fm6
Image : Boris Bocheinski

« Je m'appelle - ça se dit: Ich heiße. Und Du? Et toi? OK. Sehr gut (très bien). » L'animatrice Sophie Gaudan aide les élèves à apprendre la langue de l'autre, elle leur transmet les règles de base. L'échange entre jeunes a toujours été un pilier des relations franco-allemandes. Éveiller la curiosité de l'autre, transmettre les connaissances linguistiques – tout ceci est compris dans le programme « le vent tourne ». Pendant une semaine, des jeunes Français et Allemands de classes de troisième et de seconde sont réunis à Bremerhaven pour un échange culturel, mais pas seulement. Au programme également : les énergies renouvelables, et notamment l'énergie éolienne.

« Tout est difficile au début » explique l'animatrice Sophie Gaudan
« Tout est difficile au début » explique l'animatrice Sophie GaudanImage : Boris Bocheinski

Deux quartiers sensibles serrent les rangs ensemble

Côté allemand, les élèves viennent du quartier berlinois de Neukölln. Le collège professionnel Rütli a fait les gros titres de la presse en 2006 lorsque les professeurs ont dénoncé ouvertement les problèmes de violence de leurs élèves. Aujourd'hui, le collège Rütli n'existe plus, on trouve un « campus Rütli » avec une école primaire, un club de jeunes, un jardin d'enfants et une école communautaire. Ce sont des élèves de cette école qui rencontrent les lycéens français du lycée Alfred Nobel de Clichy-sous-Bois, à 35 kilomètres au nord de Paris. Clichy-sous-Bois, la ville où les émeutes des banlieues de 2005 ont éclaté, alors que deux jeunes venaient de mourir en tentant d'échapper à la police.

Premier devoir lors de leur arrivée pour leur semaine commune à Bremerhaven : les élèves doivent trouver un mot identique ou semblable dans les deux langues – allemande et française – pour chacune des lettres de l'alphabet. « Auto! Banane ! Croissant ! Date ! » « Ah, c'est pas la même chose, piège! » : Sophie interrompt les élèves. « C'est vrai que c'est le même mot, mais il a deux sens différents. Le mot français ‘date’ signifie une date, ‘das Datum’ en allemand. Et le mot allemand ‘Date’ signifie ‘rendez-vous’ en français. »

Berlin-Neukölln et Clichy-sous-Bois mènent des projets communs depuis trois ans. L'animatrice française Sophie Gaudan a fait de nombreuses expériences avec des groupes interculturels. Pour elle, il est normal qu'une rencontre soit difficile au début. « Les jeunes qui ne connaissent pas la langue, la culture et le pays de l'autre, ont tendance à se replier sur eux-mêmes. Il faut les aider, à l'aide d'outils comme l'animation linguistique, à dépasser ces blocages. »

Gordian (à g., Neukölln) etMedhi (à d., Clichy-sous-Bois) cherchent des mots semblables dans les deux langues
Gordian (g., Neukölln) etMedhi (d., Clichy-sous-Bois) cherchent des mots semblables dans les deux languesImage : Boris Bocheinski

S'entendre avec l'étranger

L'hébergement en auberge de jeunesse doit aider les jeunes à s'ouvrir aux personnes qui sont différentes: chaque chambre est composée de deux Français et deux Allemands. Partager autant d'intimité avec un étranger n'est pas facile pour tous les jeunes.« Le premier contact était difficile, parce que nous n'avons pas osé faire le premier pas vers l'autre, et puis après, c'est venu tout seul », explique Claudia, 15 ans. Cette jeune Française apprend l'allemand depuis quatre ans, c'est la première fois qu'elle vient en Allemagne. Elle veut améliorer ses connaissances linguistiques et apprendre plus de choses sur l'Allemagne et les Allemands.

« Le premier contact était difficile parce qu'on était un peu timide » raconte la Française Claudia (à g.)
« Le premier contact était difficile parce qu'on était un peu timide » raconte la Française Claudia (à g.)Image : Boris Bocheinski

Zeljko est Allemand et apprend le français depuis deux ans. Lui non plus n'est jamais allé dans le pays de l'autre, en l'occurrence la France. Pour lui, ce qui compte est « d'arriver à s'entendre et à améliorer son français ». Son camarade de classe Ayman acquiesce : « le plus important pour moi, c'est de connaître de nouvelles personnes qui ne connaissent pas ma langue et de réussir à échanger malgré tout ».

La participation au programme est gratuite pour les élèves. L'Office franco-allemand pour la Jeunesse (OFAJ) et des sponsors du secteur de l'énergie éolienne prennent tout en charge. L'objectif est de permettre à des jeunes qui n'en ont pas la possibilité de participer à des échanges internationaux. Tous les élèves ne participent pas: les meilleurs et les plus assidus sont choisis. Car le programme vise non seulement à apprendre à connaître la culture de l'autre, mais aussi à réfléchir à ses perspectives professionnelles.

Une orientation professionnelle – autrement

Au cours de la semaine, les élèves visitent une base d'hélicoptères assurant la maintenance d'éoliennes, et un atelier de la filiale franco-allemande du groupe énergétique Areva. Boris Bocheinsky a planifié le projet pendant un an et demi, il explique aux participants pourquoi il a décidé de travailler dans le domaine de l'énergie éolienne: « Dans les prochaines années, cette industrie va créer plusieurs dizaines de milliers d'emplois en Europe – des emplois diversifiés : nous aurons besoin d'ingénieurs, de pilotes, mais aussi de mécaniciens ou de personnes qui gèrent la maintenance ». Il cite pour exemple les entreprises franco-allemandes comme Areva ou EADS, pour lesquelles les élèves pourront mettre à profit leurs connaissances des langues française et allemande.

Poignée de main entre enseignant et élève
Poignée de main entre enseignant et élèveImage : Boris Bocheinski

Yamen Adissa enseigne les sciences électrotechniques au lycée Alfred Nobel. Pour lui, cette semaine est une bonne occasion de pousser les élèves à chercher du travail aussi dans le pays voisin. « Ils ne doivent pas rester en France à attendre de trouver un boulot. Ils peuvent aussi laisser la France quelque temps et partir pour l’Allemagne. »

Mais pour l'heure, c'est déjà la fin de cette première journée du séjour. Et pour clore en beauté la journée, le groupe va voir le match de hockey sur glace et supporter l'équipe de Bremerhaven « Fischtown Pinguins » contre les « Starbulls Rosenheim ». Pour les Français, c'est une découverte supplémentaire d'une facette jusqu'ici inconnue de l'Allemagne.