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Le silence de la Cédéao face aux troisièmes mandats

Noël Tadégnon
25 août 2023

Ferme face aux putschistes au Niger, la Cédéao est critiquée pour ne pas avoir sanctionné les troisièmes mandats en Côte d’Ivoire ou encore au Togo.

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Des jeunes manifestants se dispersent dans une rue d'Abidjan.
Des Ivoiriens avaient manifesté contre le troisième mandat d'Alassane Ouattara en 2020.Image : Patrick Fort/AFP/Getty Images

Cet attentisme de la Cédéao face aux nombreux troisièmes mandats en Côte d'Ivoire, en Guinée ou encore au Togo donne aujourd’hui des arguments à ceux qui, soit soutiennent les coups d’Etat militaires comme celui au Niger, soit s’en prennent à l’impartialité de l’organisation régionale. 

Ce silence de la Cédéao face à la problématique d’un troisième mandat dans certains pays ouest africains est très critiqué dans la sous-région. Or, selon une opinion largement partagée, la question du troisième mandat présidentiel devrait être aussi critiquée et combattue par la Cédéao.  

"Rupture de constitutionnalité"

Foli Ekoué Gadah est enseignant-chercheur aux Universités publiques du Togo, "la Cédéao s’est comportée de manière très molle quand il s’agissait de réagir contre le coup de force effectué par le président ivoirien Alassane Ouattara, ou encore dans d’autres pays. Les modifications de la Constitution pour se maintenir au pouvoir constituent des ruptures de constitutionnalité. Ce sont des coups d’Etat avec la même conséquence, du point de vue des frustrations et des mécontentements que l’on génère, qu’un coup d’Etat militaire."

Ecoutez le reportage au Togo...

Pour l’essayiste et politologue togolais Mohamed Madi Djabakate, la plupart des chefs d’Etat de la Cédéao sont tentés par le "virus du troisième mandat".  

Le Togo et la Gambie s’étaient déjà opposés, en 2015, à une proposition de réforme de la Cédéao visant à faire du principe de limitation à deux mandats une règle intangible de gouvernance en Afrique de l’Ouest.  

Mohamed Madi Djabakate estime qu'"il y avait que deux élèves qui n’étaient pas assidus, à savoir Faure Gnassingbé et Yahya Jammeh. Et soudainement, les opinions publiques ont réalisé que c'étaient les élèves qu’on connaissait. Il y avait d’autres élèves plus récalcitrants derrière, avec la suite logique des troisièmes mandats, des forcings constitutionnels qui ont été observés un peu dans tous les pays de la Cédéao, d’une façon ou d’une autre." 

Une affiche de campagne de l'ancien président guinéen Alpha Condé en 2020
Alpha Condé avait fait modifier la Constitution en 2020 par référendum Image : Cellou Binani/AFP/Getty Images

Pratique de plus en plus impopulaire 

Mais pour Foli Ekoué Gadah, le cas du Togo, où le président Faure Gnassingbé en est à son quatrième mandat, serait particulier. 

A son arrivée au pouvoir en 2005, il n’y avait pas de limitation du mandat présidentiel au Togo. La limitation du mandat à deux a été adopté le 9 mai 2019 par l’Assemblée nationale. Or, Faure Gnassingbé avait déjà fait deux mandats, explique-t-il. 

"Ce qui fait aujourd’hui son quatrième mandat. C’est le quatrième mandat cumulé dans deux régimes présidentiels de constitutionnalité différente", précise Foli Ekoué Gadah. 

S’éterniser au pouvoir en multipliant les mandats présidentiels est malgré tout une pratique de plus en plus impopulaire en Afrique. Des organisations de la société civile en ont fait leur priorité désormais et veulent trouver une solution pour y mettre fin.