1. Aller au contenu
  2. Aller au menu principal
  3. Voir les autres sites DW

Cuba libre... de voyager ?

Wulf Wilde, Philippe Pognan14 janvier 2013

C'est une première : à partir du lundi 14 janvier 2013, les quelque onze millions de Cubains peuvent - en théorie - quitter leur île et voyager en toute liberté à l'étranger.

https://p.dw.com/p/17JW9
Enfin un passeport légal !Image : REUTERS

C'est aujourd'hui, lundi 14 janvier 2013, que la réforme de la loi migratoire promise en octobre dernier par le président Raul Castro entre en vigueur. Mais cela signifie-t-il vraiment que, pour la première fois depuis un demi-siècle, chaque Cubain peut se rendre à l'étranger sans problème ?

Oui, en partie s'il a plus de 18 ans et surtout s'il peut se le permettre, car il faut tout de même débourser pas moins de 100 dollars pour obtenir un passeport. Une somme énorme pour le Cubain moyen, quand on sait qu'à Cuba un salaire mensuel se chiffre en moyenne à 20 dollars ! Si on ajoute à cela les frais de voyage, il est clair que peu de Cubains pourront se le permettre.

Kuba Neue Reisebestimmungen
Des Cubains font la queue devant un bureau officiel délivrant les passeports (le 11 janvier 2013)Image : REUTERS

De plus, la nouvelle réforme ne permettra pas vraiment à tous les Cubains de pouvoir se déplacer librement, même s'ils en avaient les moyens financiers. Des restrictions existent : ainsi la nouvelle législation prévoit notamment neuf cas dans lesquels les autorités peuvent refuser de délivrer un passeport. Entre autres : "pour garder au pays la main d'œuvre qualifiée" ou "par intérêt public", ce qui laisse de nombreuses possibilités d'interprétation, aussi sur le plan politique, comme le souligne une experte de Cuba, la professeure Ingrid Kummels, de l'Université Libre de Berlin :

« De fait, ce règlement permet l'arbitraire. En ce sens que cela dépend de l'opinion politique du candidat au voyage. Dans les cas politiques, je suppose qu'il n'y aura pas de grand changement. »

Certes, c'est tout de même la première fois depuis les années 1960 que le régime communiste assouplit les très sévères restrictions que Fidel Castro avait imposées en 1961. Jusqu'à ce jour, les formalités (passeport, permis de sortie, certifications de documents, visa du pays de destination) pouvaient coûter jusqu'à 500 dollars. Tout Cubain voulant quitter l'île légalement devait solliciter une "carte blanche" et présenter une lettre d'invitation de l'étranger. Et au cas où ils seraient restés plus de 11 mois hors de Cuba, tous leurs biens pouvaient être confisqués.

Angler in Havanna Kuba
Des pêcheurs sur le "Malecon" à La Havanne. Au large, la Floride est devenue un peu plus facilement accessibleImage : picture-alliance/dpa

Mais avec la nouvelle législation, non seulement les dissidents politiques mais aussi les sportifs de haut niveau, certains dirigeants et professionnels "essentiels" notamment continueront à faire l'objet de restrictions de sortie. Ce qui fait dire à ce Cubain qui veut rester anonyme :

« À Cuba, il existe un proverbe qui signifie littéralement : le même chien avec un autre collier. C'est-à-dire que la législation limite toujours la liberté de voyager. »

À La Havanne, le gouvernement cubain a justifié ces restrictions en affirmant que depuis des décennies les États-Unis favorisent délibérément les défections de vedettes du sport et la "fuite de cerveaux".